Mme X et Mme Y ont vécu plusieurs années en concubinage. Mme Y a eu recours à une procréation médicalement assistée avec tiers donneur réalisée à l’étranger et a donné naissance à une fille. Mme X et Mme Y ont mis fin à leur concubinage en 2006. Dix ans après, Mme X demande l’adoption plénière de la fille de Mme Y. Mme Y et sa fille ont donné leurs consentements à l’adoption.
La cour d’appel rejette la demande d’adoption plénière, considérant que cette adoption n’est pas conforme à l’intérêt de l’enfant.
Au contraire, selon Mme X, demanderesse au pourvoi, l’intérêt supérieur de l’enfant impose à l’État de permettre à un lien familial établi de se développer. Elle reproche en particulier à la cour d’appel de ne pas avoir procédé à un contrôle de proportionnalité de l’application des dispositions nationales en matière d’adoption au regard de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. Selon elle, la cour aurait dû écarter les textes nationaux, et permettre l’adoption de l’enfant par Mme X, tout en conservant le lien de filiation avec Mme Y. En ne procédant pas ainsi, la cour d’appel aurait privé sa décision de base légale.
La Cour de cassation rejette le pourvoi. L’adoption plénière d’un enfant par une personne seule aurait pour effet de substituer à sa filiation d’origine le lien de filiation adoptif, le privant ainsi de toute appartenance à sa famille par le sang. Seule l’adoption plénière de l’enfant du conjoint laisse subsister la filiation d’origine à l’égard du parent biologique. Le droit au respect de la vie privée et familiale (Conv. EDH, art. 8) n’impose pas de consacrer tous les liens d’affection, mêmes anciens et établis, par une adoption.
Concrètement, quelles solutions s’offrent à Mme X et Mme Y ? Elles pourraient bien évidemment se marier, mais la rupture de leur concubinage de longue date rend cette option plus qu’improbable. Subsistent la délégation d’autorité parentale si les circonstances l’exigent ou le droit de visite et d’hébergement du tiers qui a noué avec l’enfant des liens affectifs durables.
Cass. 1re civ., 28 févr. 2018, no 17-110109